Définitions :
- Symbole linguistique utilisant le dessin et la représentation symbolique du temps de l'Égypte antique; (Familier) Style, écriture, langage... (source : fr.wiktionary)
- hieroglyphes - Forme ancienne d'écriture utilisant des phonogrammes, des logogrammes et des déterminatifs disposés en lignes horizontales et verticales. (source : civilisations)
- hieroglyphes - (les) : dessins représentant un son, un groupe de sons ou des mots utilisés dans l'écriture de l'Ancienne Égypte hiéroglyphes (les) (source : saskschools)
Un hiéroglyphe[1] est un caractère de l'écriture égyptienne.
L'écriture hiéroglyphique est figurative : les caractères qui la composent représentent en effet des objets divers, — naturels ou produits par l'homme —, tels que des plantes, des figures de dieux, d'humains et d'animaux... (cf. classification des hiéroglyphes). Les égyptologues y distinguent habituellement trois catégories de signes : les signes-mots (ou idéogrammes), qui désignent un objet ou, par métonymie, une action ; les signes phonétiques (ou phonogrammes), qui correspondent à une consonne isolée ou à une série de consonnes[2] ; les déterminatifs, signes «muets» qui indiquent le champ lexical auquel appartient le mot.
Apparue à la fin du IVe millénaire av. J. -C. en Haute-Égypte (sud du pays), l'écriture hiéroglyphique est utilisée jusqu'à l'époque romaine, soit pendant plus de trois mille ans. La connaissance des hiéroglyphes se perd avec la fermeture des lieux de culte païens par l'empereur Théodose Ier vers 380, et il faudra, après la découverte de la pierre de Rosette, le génie de Jean-François Champollion[3] pour briser, après quatorze siècles, ce qui paraissait être «un sceau mis sur les lèvres du désert»[4].
Étymologie
Le mot hiéroglyphe dérive du grec ἱερογλύφος / hieroglúphos, constitué lui-même à partir de ἱερός / hierós («sacré») et γλύφειν / glúphein («graver»).
À l'époque gréco-romaine, il désignait «celui qui trace les hiéroglyphes» et non les hiéroglyphes eux-mêmes, qui se disaient τὰ ἱερογλυφικά (γράμματα) / tà hieroglyphiká (grámmata) , c'est-à-dire «les (caractères) sacrés gravés» sur les monuments (stèles, temples et tombeaux). Ultérieurement, par un glissement de sens, le mot hiéroglyphes finit par désigner les caractères hiéroglyphiques eux-mêmes.
Les Égyptiens eux-mêmes nommaient leur écriture medou-netjer («parole divine») soit, en, mdw nṯr : |
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Par extension, on qualifie fréquemment de hiéroglyphique une écriture utilisant le même principe logographique que l'égyptien. Ainsi, on parle du hittite ou du maya hiéroglyphiques. Il n'est cependant pas admis de dire des caractères chinois qu'ils sont des hiéroglyphes (ce sont des sinogrammes). Hiéroglyphes comme sinogrammes appartiennent à la totalité plus vaste des logogrammes (à ne pas confondre avec les logotypes, symboles propres à une entreprise ou à un produit. )
Histoire et évolution
Dernière inscription hiéroglyphique connue, porte d'Hadrien à
Philaé
L'écriture hiéroglyphique est attestée dès la fin du IVe millénaire av. J. -C. [5], peu après la naissance des caractères cunéiformes en Mésopotamie. Elle fut employée pendant plus de 3 000 ans : la dernière inscription connue à ce jour est datée du 24 août 394, et se trouve dans le temple de Philaé[6].
Dès l'Ancien Empire[7], l'égyptien hiéroglyphique fut un dispositif d'écriture où se mêlaient idéogrammes, signes consonantiques (unilitères, bilitères, et même trilitères) et déterminatifs (voir plus bas). À partir de la XVIIIe dynastie, les scribes utilisaient un certain nombre de bilitères comme syllabaires (sȝ, bȝ, kȝ etc. ) pour transcrire les noms sémitiques ou d'origine sémitique, mais l'écriture dite syllabique ne sortit jamais de ce domaine.
Quelle que soit leur fonction, les signes sont figuratifs : ils représentent quelque chose de tangible, fréquemment aisément reconnaissable, même pour quelqu'un qui ignore le sens du signe. En effet, pour le dessin des hiéroglyphes, les Égyptiens s'inspirèrent de leur environnement : objets de la vie quotidienne, animaux, plantes, parties du corps. À l'époque de l'Ancien, du Moyen et du Nouvel Empire, il existait à peu près sept cents signes hiéroglyphiques, tandis qu'à l'époque gréco-romaine, on en dénombrait plus de six mille.
Les hiéroglyphes furent gravés sur pierre ou bien, dans le cas de l'écriture hiératique, tracés au calame ainsi qu'à l'encre sur un support moins durable.
L'utilisation des hiéroglyphes gravés se limitait aux domaines où l'esthétique et/ou la valeur magique des mots avaient de l'importance : formules d'offrandes et fresques funéraires, textes religieux, inscriptions officielles.
L'écriture hiératique en est la forme cursive. Réservée aux documents administratifs ainsi qu'aux documents privés, elle avait pour support le papyrus, les ostraca (tessons de poterie ou de calcaire), le parchemin ou encore des tablettes de bois. Les égyptologues la distinguent des hiéroglyphes nommés linéaires, qui furent peints sur les sarcophages en bois et les papyrus des «Livres des morts». Les hiéroglyphes linéaires conservent davantage l'aspect figuratif des hiéroglyphes gravés, mais furent tracés avec moins de précision que ces derniers.
À partir de l'époque saïte (XXVIe dynastie), l'hiératique fut partiellement supplanté par une nouvelle cursive, le démotique. C'est une simplification extrême de l'écriture hiératique, réservée aux actes administratifs ainsi qu'aux documents de la vie courante, d'où son nom d'écriture «populaire». L'hiératique n'était alors plus utilisé que pour consigner des textes religieux ou sacerdotaux, conjointement avec les hiéroglyphes, d'où son nom d'écriture «sacerdotale». À l'époque ptolémaïque, le grec s'imposa de plus en plus comme langue administrative : à partir de -146 les contrats rédigés seulement en démotique avaient perdu toute valeur légale.
Le copte est le dernier stade de la langue et de l'écriture égyptiennes. Il est toujours utilisé aujourd'hui, mais seulement comme langue liturgique. Il s'écrit au moyen de l'alphabet grec auquel on a ajouté sept caractères démotiques pour transcrire les sons étrangers au grec.
L'écriture égyptienne n'est plus utilisée aujourd'hui pour écrire quelque langue moderne que ce soit. Cependant, selon certains chercheurs, c'est elle qui, via le proto-sinaïtique, aurait donné naissance à l'alphabet phénicien, lequel, à son tour, sera à l'origine des alphabets hébreu, araméen et grec, par conséquent des caractères latins et cyrilliques[8].
Le dispositif d'écriture
Les hiéroglyphes gravés sont tous, ou peu s'en faut, figuratifs : ils représentent des éléments réels ou imaginaires, quelquefois stylisés et simplifiés, mais idéalement reconnaissables dans la majorité des cas.
Champollion, le déchiffreur des hiéroglyphes, reconnu comme le père de l'égyptologie, définit le dispositif hiéroglyphique comme suit :
«C'est un dispositif complexe, une écriture tout à la fois figurative, symbolique et phonétique, dans un même texte, une même phrase, je dirais presque dans un même mot
[9].»
En effet, un même caractère peut, selon le contexte, être interprété de diverses manières : comme phonogramme[10] (lecture phonétique), comme idéogramme ou comme déterminatif (lecture sémantique). Nous verrons plus loin que le déterminatif, qui ne se lit pas, favorise la lecture en «déterminant» le champ lexical auquel le mot appartient : ainsi, le déterminatif de l'«homme assis» (A 1 selon la classification de Gardiner) accompagne les mots désignant la fonction («vizir», «prêtre»), la profession («artisan»), l'ethnie («Asiatique», «Égyptien», «Libyen», «Nubien») ou encore les liens de parenté («père», «fils», «frère»).
Dans les parties qui suivent, les hiéroglyphes seront translittérés, c'est-à-dire retranscrits avec symboles d'un autre dispositif d'écriture.
Lecture phonétique
On lit le caractère indépendamment de son sens, selon le principe du rébus. Les phonogrammes sont constitués soit d'une consonne (signes dits mono- ou unilitères), soit de deux (signes bilitères) ou de trois (signes trilitères). Les vingt-quatre signes unilitères forment le pseudo-alphabet hiéroglyphique (voir plus bas).
Il faut préciser que l'écriture hiéroglyphique ressemble à un abjad : elle ne note pas les voyelles, à la différence du cunéiforme par exemple. C'est une écriture défective (scriptio defectiva).
Ainsi, le hiéroglyphe représentant un canard se lit sȝ, car telles étaient les consonnes du mot désignant cet animal. On peut cependant utiliser le signe du canard sans rapport avec le sens pour représenter les phonèmes s et ȝ à la suite (indépendamment des voyelles qui pourraient accompagner ces consonnes) et ainsi écrire des mots comme sȝ, «fils» ou, en complétant avec d'autres signes qu'on détaillera plus loin, sȝw, «garder, surveiller», sȝṯ. w, «terre ferme» :
|
: le même caractère utilisé seul (le sens du petit trait vertical sera expliqué plus loin) pour signifier «canard» ou, avec le déterminatif approprié, «fils», deux mots ayant les mêmes consonnes ; |
|
: le caractère sȝ au sein du mot sȝw, «garder, surveiller» et dans |
L'«alphabet» hiéroglyphique
Pour certains caractères, le principe du rébus devint celui de l'acrostiche : on ne lit plus que la première consonne du mot.
Exemples d'utilisation d'idéogrammes pour leur valeur unilitère. [11].
Idéogramme |
Objet représenté |
Utilisation comme idéogramme |
Valeur phonétique de l'idéogramme |
Valeur unilitère |
|
bouche |
«bouche» |
/rȝ/ |
/r/ |
|
pied |
«lieu (où on pose le pied)» |
/bw/ |
/b/ |
|
cobra |
«cobra» |
/ḏt/ |
/ḏ / |
Ainsi, on peut regrouper les vingt-quatre signes unilitères en une sorte d'«alphabet» hiéroglyphique, qui, cependant, ne fut jamais utilisé comme tel à la place des autres hiéroglyphes, quoique c'eût été envisageable : en effet, l'ensemble des mots égyptiens auraient pu être rédigés au moyen de ces seuls signes, mais les Égyptiens n'ont jamais franchi le pas et simplifié leur écriture complexe en alphabet. Le pseudo-alphabet égyptien est par conséquent composé de caractères ne notant qu'une seule consonne, quoique certains d'entre eux en désignent plusieurs lorsqu'il s sont employés comme idéogrammes.
Pseudo-alphabet hiéroglyphique, dans l'ordre conventionnel des dictionnaires et des grammaires.
Signe |
Translittération |
Objet représenté |
Valeur phonétique |
Code Gardiner |
|
ȝ |
vautour |
aleph hébreu |
G 1 |
|
ỉ |
roseau fleuri |
yod hébreu |
M 17 |
|
y |
roseaux fleuris |
yod hébreu |
- |
|
ˁ |
avant-bras |
ayin hébreu |
D 36 |
|
w |
caille |
[u] |
G 43 |
|
b |
pied |
[b] |
D 58 |
|
p |
siège |
[p] |
Q 3 |
|
f |
vipère à cornes |
[f] |
I 9 |
|
m |
chouette |
[m] |
G 17 |
|
n |
eau |
[n] |
N 35 |
|
r |
bouche |
[r] |
D 21 |
|
h |
abri en roseaux |
[h] |
O 4 |
|
ḥ |
tresse de lin |
[h] emphatique |
V 28 |
|
ḫ |
placenta (?) |
[x] |
Aa 1 |
|
ẖ |
pis et queue d'un mammifère |
[ç] |
|
s |
verrou |
[z] |
O 34 |
|
ś |
étoffe pliée |
[s] |
S 29 |
|
š |
pièce d'eau |
[ʃ] |
N 37 |
|
ḳ |
pente |
[kw] |
N 29 |
|
k |
corbeille |
[k] |
V 31 |
|
g |
support de jarre |
[g] |
W 11 |
|
t |
pain |
[t] |
X 1 |
|
ṯ |
entrave |
tj |
V 13 |
|
d |
main |
[d] |
D 46 |
|
ḏ |
cobra |
[d͡ʒ] |
I 10 |
Les compléments phonétiques
Une tête de bœuf, un serpent, une main...
L'écriture égyptienne est fréquemment redondante : en effet, il est particulièrement habituel qu'un mot soit suivi de plusieurs caractères notant les mêmes sons, pour guider la lecture. A titre d'exemple, le mot nfr, «beau, bon, parfait», peut n'être rédigé qu'au moyen du trilitère
|
mais il est énormément plus habituel qu'on ajoute à ce trilitère les unilitères pour f et r. |
Il est par conséquent rédigé nfr+f+r, mais on lit nfr.
Les caractères redondants accompagnant les signes bilitères ou trilitères sont nommés «compléments phonétiques». Ils se placent devant le signe à compléter (rarement), après (en règle générale) ou bien ils l'encadrent, servant ainsi d'aide à la lecture, d'autant que le scribe, pour des raisons de calligraphie, inversait quelquefois l'ordre des signes (voir plus bas) :
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mdw +d +w (les compléments sont positionnés après) → on lit mdw, «paroles, langue» ; |
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ḫ +p +ḫpr +r +j (les compléments encadrent) → on lit ḫpr. j, «Khépri». |
Les compléments phonétiques permettent surtout de différencier les homophones. En effet, les signes n'ont pas forcément une lecture unique :
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par exemple, le siège, peut se lire st, ws et ḥtm, selon le contexte dans lequel il se trouve. |
La présence de compléments phonétiques - et du déterminatif approprié - sert à savoir quelle lecture suivre :
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st (écrit st+t ; le dernier caractère est le déterminatif de la maison ou de ce qui s'y rapporte), «siège, trône, lieu» ; |
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st (écrit st+t ; le dernier caractère est l'œuf, déterminatif du nom de la déesse Isis), «Isis». |
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wsjr (écrit ws+jr, avec comme complément phonétique l'œil, qui se lit jr, suivi du déterminatif du dieu), «Osiris». |
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ḥtm. t (écrit ḥ+ḥtm+m+t, avec le déterminatif du chacal), un type de bête sauvage, peut-être l'ours ; |
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ḥtm (écrit ḥ+ḥtm+t, avec le déterminatif de l'oiseau s'envolant), «disparaître». |
Enfin, il arrive quelquefois que des mots aient changé de prononciation comparé à l'ancien égyptien : dans ce cas, il n'est pas rare que l'écriture adopte un compromis dans la notation, les deux lectures étant indiquées conjointement. C'est le cas surtout pour l'adjectif bnrj, «doux (i. e. d'une saveur agréable)», devenu bnj, et le verbe swri, «boire», devenu swj. On les rédigé, en moyen égyptien, bnrj et swri,
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, qui se lisent cependant bnj et swj, le r n'ayant été conservé que pour garder un lien rédigé avec le mot ancien (à la manière de notre monsieur, qui ne se lit plus comme il s'écrit). |
Lecture sémantique
Outre une interprétation phonétique, les caractères peuvent être lus pour leur sens : on parle dans ce cas de logogrammes (plus exactement d'idéogrammes) et de déterminatifs (ou sémagrammes) [12].
Logogrammes
Un hiéroglyphe utilisé comme logogramme sert à désigner l'objet dont il est l'image. Les logogrammes sont par conséquent le plus fréquemment des noms communs ; ils sont le plus souvent accompagnés d'un trait vertical muet indiquant leur valeur de logogramme (l'utilisation du trait vertical est détaillée plus bas) [13] en principe, tout hiéroglyphe aurait pu servir de logogramme. Les logogrammes peuvent être accompagnés de compléments phonétiques. Dans quelques cas, le rapport sémantique est indirect, métonymique ou métaphorique.
Exemples d'hiéroglyphes utilisés comme logogrammes. Dans les trois derniers exemples, le rapport sémantique est de type métonymique ou métaphorique.
Hiéroglyphe |
Prononciation |
Objet représenté |
Sens |
|
rˁ |
soleil |
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pr |
maison |
|
swt |
jonc (t est le complément phonétique) |
|
ḏw |
montagne |
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nṯr |
étendard de temple |
Dieu |
|
bȝ |
oiseau à tête humaine (représentation respectant les traditions du bâ) |
âme, «bâ» |
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dšr |
«flamant rose» - le phonogramme correspondant veut dire «rouge», et l'oiseau est associé par métonymie à cette couleur. |
Déterminatifs
Les déterminatifs ou sémagrammes se placent en fin de mot. Ce sont des caractères muets permettant de indiquer le champ lexical du mot. Les cas d'homographies étant particulièrement habituels (d'autant plus que seules les consonnes sont rédigées), le recours aux déterminatifs est essentiel. Si un procédé identique existait en français, on ferait suivre les mots homographes d'un indice qu'on ne lirait pas, mais qui en préciserait le sens : «vers [poésie]» et le pluriel «vers [animal]» seraient ainsi distingués.
Il existe de nombreux déterminatifs : divinités, humains, parties du corps humain, animaux, plantes etc. Certains déterminatifs possèdent un sens propre et un sens figuré. Ainsi, le rouleau de papyrus,
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, permet de déterminer les rédigés, mais également les notions abstraites. |
Voici quelques exemples d'utilisation des déterminatifs[14] permettant d'en illustrer l'importance :
Exemples de déterminatifs hiéroglyphiques levant l'ambiguïté entre les homophones nfr.
Mot |
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Prononciation |
nfr. w |
nfr. t |
nfr. w |
nfr |
nfr |
Pictogramme déterminatif |
enfant portant la main à sa bouche. |
femme assise |
maison |
bande d'étoffe frangée |
cruche avec marque du pluriel |
Catégorie lexicale indiquée[15] |
enfant, jeune |
femme |
maison, bâtiment |
tissu, vêtement |
pot, vaisselle, boisson |
Signification du mot |
recrues militaires |
jeune femme nubile |
fondations |
vêtement |
vin, bière |
Nota :
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Ce déterminatif est un raccourci pour signaler trois occurrences du mot, c'est-à-dire son pluriel (puisque la langue égyptienne |
connaît un duel, indiqué quelquefois par deux traits).
Tous ces mots ont la connotation méliorative «bon, beau, parfait». Notons qu'un dictionnaire récent[16] indique une vingtaine de mots se lisant nfr ou constitués à partir de ce mot – preuve de l'extraordinaire richesse de la langue égyptienne.
Sens de lecture
Les hiéroglyphes s'écrivent de droite à gauche, de gauche à droite ou de haut en bas, la direction usuelle étant de droite à gauche. Le lecteur, pour connaître le sens de lecture, doit considérer la direction dans laquelle sont tournés les hiéroglyphes asymétriques. A titre d'exemple, lorsque les figures humaines et les animaux, aisément repérables, regardent vers la gauche, il faut lire de gauche à droite, et vice versa.
Les mots ne sont pas scindés par des blancs ou des signes de ponctuation. Cependant, certains caractères apparaissent en particulier en fin de mot, de sorte qu'il est quelquefois envisageable de distinguer les mots par ce biais. Il est évident cependant que seule une solide connaissance de la langue et de sa syntaxe sert à découper un texte en mots.
Le quadrat
Les hiéroglyphes ne sont cependant pas simplement alignés les uns à la suite des autres : en effet, ils se répartissent harmonieusement dans un carré virtuel (c'est-à-dire non tracé), ou quadrat (aussi rédigé cadrat), à la manière des sinogrammes. À la différence des sinogrammes, cependant, tout caractère ne remplit pas entièrement le quadrat : certains n'en remplissent que la moitié, horizontalement ou verticalement, d'autres le quart.
Exemples d'hiéroglyphes occupant un quadrat, un demi-quadrat et un quart de quadrat.
Quadrat |
Demi-quadrat horizontal |
Demi-quadrat vertical |
Quart de quadrat |
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L'ordre de lecture des éléments disposés à l'intérieur d'un quadrat est indépendant du sens de lecture global, qu'il soit horizontal (quadrats disposés en lignes) ou vertical (quadrats disposés en colonnes). Les signes qui occupent un quadrat se lisent de gauche à droite puis de haut en bas, ou bien de haut en bas puis de gauche à droite.
Particularités calligraphiques et contraintes
Il existe plusieurs particularités calligraphiques, dont voici les principales :
- les caractères se répartissent en quadrats (voir plus haut) ;
- pour éviter qu'un quadrat ne soit incomplet, on inverse quelquefois des signes pour rendre la totalité plus compact. De même, dans un souci d'esthétique, on choisit avec soin les compléments phonétiques, quoiqu'il y ait redondance ;
- on inverse quelquefois les hiéroglyphes d'oiseaux tenant en un quadrat et les signes d'un quart de quadrat (le p par exemple) ; dans ce cas, le petit caractère précède et occupe le creux du quadrat ;
- on peut omettre des signes, en particulier ceux notant les phonèmes ȝ et j ;
- les signes désignant les dieux sont positionnés en tête d'énoncé, de syntagme ou de mot composé, par antéposition honorifique (inversion respectueuse).
Cependant, même si les hiéroglyphes sont inversés, la lecture et la translittération n'en tiennent bien entendu pas compte.
Signes annexes
Trait de remplacement
Un caractère quelquefois jugé offensant : «mettre au monde»
Les caractères offensants, funestes, tabous, rares ou complexes peuvent être remplacés par un trait oblique :
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ms (j) , verbe signifiant «mettre au monde», peut être rédigé : |
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le déterminatif de la femme accouchant (dernier caractère) étant quelquefois jugé offensant (ou tout simplement trop complexe à dessiner) ; |
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m (w) t, «(la) mort, mourir», sera aussi rédigé : |
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pour éviter le déterminatif de l'ennemi à terre (dernier caractère), signe funeste. |
Cartouche
On place dans un cartouche les noms de dieux (exceptionnellement) et les deux derniers noms (Roi de Haute et Basse-Égypte et Fils de Rê) de la titulature royale (toujours) :
Trait de remplissage
On fait usage du trait de remplissage pour terminer un quadrat qui serait, sinon, incomplet.
Signes agglutinés
Il existe des signes qui sont la contraction de plusieurs autres. Ces signes ont cependant une existence propre et fonctionnent comme nouveaux signes : par exemple un avant-bras dont la main tient un sceptre sert de déterminatif aux mots signifiant «diriger, conduire» ainsi qu'à leurs dérivés.
Redoublement
Le redoublement d'un signe indique son duel, le triplement son pluriel.
Signes non-figuratifs
Il s'agit :
- du trait vertical indiquant qu'il s'agit d'un idéogramme (pour les cas d'ambigüité où un même signe cœxiste comme caractère phonétique et idéogramme) ;
- des deux traits obliques du duel et des trois traits verticaux du pluriel ;
- et, emprunté au hiératique, le suffixe de formation du pluriel :
L'orthographe
La notion d'une orthographe «correcte» de l'égyptien hiéroglyphique ne se pose pas dans les mêmes termes que pour les langues modernes. En effet, pour presque chaque mot, il existe une ou plusieurs variantes. Donc, on peut se demander si la notion de correction orthographique n'était pas étrangère à la langue égyptienne. En effet, on y trouve :
- des redondances ;
- des omissions de graphèmes, dont on ignore si elles sont intentionnelles ou non ;
- des substitutions d'un graphème à un autre, de sorte qu'il est impossible de distinguer une «faute» d'une orthographe «alternative» ;
- des erreurs et des omissions dans le tracé des signes, d'autant plus problématiques lorsque l'écriture est cursive : écriture hiératique mais en particulier démotique où la schématisation des signes est extrême.
Annexes
Bibliographie
- Sur l'étymologie, l'histoire et l'évolution :
- Jean Vercoutter, L'Égypte et la vallée du Nil, Tome 1, PUF, 1992 ;
- Elmar Edel, Altägyptische Grammatik, Pontificium Institutum Biblicum, Roma, 1955, p. 1 - 12 ;
- Alan Henderson Gardiner, Egyptian Grammar - Being an Introduction to the Study of Hieroglyphs ;
- Gustave Lefebvre, Grammaire de l'égyptien classique, Imprimerie de l'Institut français d'archéologie orientale, Le Caire, 1955, p. 5 sqq. ;
- Pascal Vernus, Espace et idéologie dans l'écriture égyptienne, Le Sycomore, Paris, 1982 .
- Christiane Ziegler, Les Hiéroglyphes, département des Antiquités égyptiennes, Editions de la Réunion des musées nationaux, Louvre, 1991 ;
- Antonio Loprieno, Ancient Egyptian - A Linguistic Introduction, Cambridge University Press, 2004, p. 5 sqq. ;
- Pierre Grandet & Bernard Mathieu, Cours d'égyptien hiéroglyphique ;
- François Neveu, La langue des Ramsès - grammaire du néo-égyptien, Khéops, Paris, 1996 ;
- W. V. Davies, Egyptian Hieroglyphs, British Museum Press, 1996 ;
- J. F. Healy, The early Alphabet, Berkeley : University of California Press, Londres, 1990 (ISBN 0520073096) ;
- James P. Allen, Middle Egyptian : An Introduction to the Language and Culture of Hieroglyphs. , Cambridge, 2000 (ISBN 0521774837) .
- Sur l'écriture «syllabique» :
- Jean-François Champollion, Principes généraux de l'écriture sacrée égyptienne : appliquée à la représentation de la langue parlée, Institut d'Orient : M. Sidhom, Paris, 1836 (réimpr. 1984) (ISBN 2905304006) .
Ouvrage «périmé»
- Jaroslav Černý and Sarah I. Groll, A Late Egyptian Grammar, Biblical Institute Press, Rome, 1975, p. 2 ;
- Adolf Erman, Neuägyptische Grammatik, Georg Olms Verlag, Hildesheim, 1979, p. 15 – 19 ;
- E. A. Wallis Budge, Egyptian language : easy lessons in Egyptian hieroglyphics, Dover Publications, New-York, 1910 (réimpr. 1983) (ISBN 0486213943) .
Ouvrage «périmé»
- Friedrich Junge, Neuägyptisch - Einführung in die Grammatik, Harrassowitz Verlag, Wiesbaden, 1999, p. 44 sq ;
- Jean-Claude Goyon, Grammaire de l'égyptien hiéroglyphique : du moyen empire au début du nouvel empire, Éditions A. C. V., Lyon, 2006 (ISBN 2913033105) .
- Sur le dispositif d'écriture :
- Erhart Gräfe, Mittelägyptisch - Grammatik für Anfänger, Harrassowitz Verlag, Wiesbaden, 2001, p. 5 – 15 ;
- Gustave Lefebvre, Grammaire de l'égyptien classique, Imprimerie de l'Institut français d'archéologie orientale, Le Caire, 1955, p. 9 – 25 .
- Sur la valeur phonétique des signes «alphabétiques» :
- Gaston Maspero, Introduction á l'étude de la phonétique égyptienne, H. Champion, Paris, 1917 ;
- Gustave Lefebvre, Grammaire de l'égyptien classique, Imprimerie de l'Institut français d'archéologie orientale, Le Caire, 1955, p. 25 – 31 .
- Pour les enfants :
- Marion Lemerle, Henri Choimet, Le monde des hiéroglyphes, Editions Mondo, Vevey, 2004 (ISBN 2832002633) .
Liens externes
Notes et références
- ↑ Le «h» d'origine est muet, mais on ne fait pas la liaison du fait que le «i» qui le suit représente la semi-consonne jod.
- ↑ L'égyptien hiéroglyphique n'écrit pas les voyelles.
- ↑ Michel Dewachter, Champollion – Un scribe pour l'Egypte, Gallimard, Paris, 1990 , p. 130
- ↑ «Les langues sacrées ont laissé lire leur vocabulaire perdu ; jusque sur les granits de Mezraïm, Champollion a déchiffré ces hiéroglyphes qui semblaient être un sceau mis sur les lèvres du désert, et qui répondait de leur éternelle discrétion …» (François-René de Chateaubriand, Les Mémoires d'Outre-Tombe, IV, XII, chap. 9)
- ↑ J. Vercoutter, p. 66
- ↑ Le dernier nom de souverain rédigé en hiéroglyphes — il s'agit en l'occurrence de l'empereur romain Decius (249 à 251) — se trouve dans le temple d'Esna.
- ↑ E. Edel, p. 13
- ↑ W. V. Davies, p. 129 sqq ; voir aussi J. F. Healy, p. 197 sqq.
- ↑ Jean-François Champollion, Lettre à M. Dacier relative à l'alphabet des hiéroglyphes phonétiques, 27 septembre 1822
- ↑ caractère qui représente un son ou phonème
- ↑ cf. Alan H. Gardiner, Egyptian Grammar, London, 1973, p. 507
- ↑ Cf. Antonio Loprieno, Ancient Egyptian, A Linguistic Introduction, Cambridge University Press, 1995, p. 13
- ↑ (en) Antonio Loprieno, Ancient Egyptian : A Linguistic Introduction, Cambridge University Press (ISBN 0521448492) , p. 13
- ↑ empruntés à l'ouvrage Je lis les hiéroglyphes de Jean Capart
- ↑ (en) Jim Loy, «Determinative Signs In Egyptian» citant Alan Henderson Gardiner, Egyptian Grammar - Being an Introduction to the Study of Hieroglyphs
- ↑ Raymond O. Faulkner, A Concise Dictionary of Middle Egyptian, Griffith Institute, Oxford, 1962, reprinted 1972, 1976, 1981, 1986, 1988, 1991, 1996, 1999, (ISBN 0-900416-32-7)